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Le Togo a modernisé ces dernières années plusieurs de ces textes de lois et pris plusieurs initiatives pour la promotion de l’égalité genre dans le pays. Ces avancées vont de l’adoption d’un nouveau code pénal plus égalitaire (Journal Officiel, 2015), d’un code nouveau foncier balayant l’ambivalence des textes coutumiers et modernes qui pénalisaient les femmes, d’une stratégie nationale d’intégration du genre dans les politiques et programmes de développement à la révision de la stratégie de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG) (Xinhua, 2012 ; Ouro-Aissah, 2010; Kuvo, 2017; Korolakina, 2016).

Ce nouvel arsenal juridique avec l’appui des associations et les partenaires au développement a permis de faire reculer certaines des plus graves violences faites aux femmes telle que l’excision (Ministère de l’Action Sociale, de la Promotion de la Femme, de la Protection de l’Enfant et des Personnes Agées, 2008; Dagban-Zonvide, 2013; 27avril.com, 2014; Réaux, 2018; Enquête Démographique et de Santé III, 2015). Des avancées sont également obtenues dans les domaines de l’éducation des filles et de l’accès des femmes à l’emploi (Enquête Démographique et de Santé III, 2015). Mais dans d’autres domaines les gaps ont du mal à être comblés, notamment au niveau de l’accès des femmes en politique (Isbell & Akinocho, 2018), l’accès au foncier, et la persistance des violences physiques et sexuelles ainsi que les mariages précoces (Enquête Démographique et de Santé III, 2015).

Les données du dernier sondage Afrobaromètre viennent confirmer les progrès obtenus au Togo sur le front de l’égalité des droits entre les hommes et les femmes sur de nombreuses dimensions. Ils mettent cependant également la lumière sur certaines dimensions de cette égalité entre sexes où les chiffres sont préoccupants. Ainsi, les cas de discriminations basées sur le sexe existent toujours, et le taux d’acceptation des violences physiques envers les femmes reste problématique.

De plus, fort est de constater que malgré les bonnes dispositions des Togolais sur la majorité des indicateurs liés aux questions du genre et des droits de la femme, les avancées ont encore du mal à se traduire dans le quotidien de ces dernières. Elles sont, par exemple, encore sous-représentées en politique. Au niveau du Parlement, la situation bien qu’ayant connu une amélioration sur la même période, n’est pas des plus reluisante. En effet, sur les trois dernières législatures, la représentation des femmes au sein de parlementaires est passée de 7% en 2002 à 11% en 2007 et à 19% en 2013 (Assemblée Nationale, 2015; Kuvo, 2017). Le pouvoir exécutif ne fait pas mieux car l’équipe gouvernementale actuelle compte 21% de femmes (IZF.net, 2018a).

Au-delà de la représentation dans le monde politique, l’accès à la propriété foncière et surtout en matière de succession demeure un grand défi. En effet, par le passé, le droit coutumier cohabitait avec le droit moderne au Togo. Or, dans de nombreuses traditions, la femme bien qu’étant un acteur très actif dans l’exploitation des terres, la commercialisation des produits agricoles, et leurs transformations, elles n’avaient pas droit d’hériter de la terre. Depuis quelques années, le gouvernement a lancé le processus de réformes dans le secteur qui a débouché sur le Forum National du Foncier au Togo un avant-projet, et ce dernier a été adopté en juin 2018 par l’Assemblée Nationale (Togo Officiel, 2018; Isbell & Akinocho, 2018). Des organisations non-gouvernementales soutenues par les partenaires techniques et financiers essayent de diffuser ces nouveaux textes afin de réduire le fossé entre les sexes au niveau de l’accès à la terre (Isbell & Akinocho, 2018).

Ce papier essaiera de confronter les données d’Afrobaromètre avec d’autres sources afin de permettre de juger aussi bien les normes actuelles auxquelles les Togolais adhèrent, mais aussi au-delà de ces normes la réalité du terrain sur ces questions de genre.

Hervé Akinocho

Hervé Akinocho is the director of the Center for Research and Opinion Polls – CROP, based in Lome in Togo.