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Les changements climatiques constituent « le plus grand défi développemental de notre époque », et l’Afrique est le continent le plus vulnérable à ses conséquences, selon l’Union Africaine (2015) et les Nations Unies (ONU Environnement, 2019). Les agriculteurs ougandais inlassablement en attente de la pluie (URN, 2019), les rescapés de cyclone en Mozambique et au Zimbabwe creusant leur chemin pour se sortir de la boue et enterrant leurs morts (Associated Press, 2019) – ces images font comprendre ce que les changements climatiques et les conditions atmosphériques de plus en plus extrêmes pourraient signifier pour les Africains ordinaires.

Les changements à long terme des températures et du régime des pluies constituent une menace particulière pour l’Afrique, dont l’agriculture constitue le pivot économique des priorités de développement comme la sécurité alimentaire et l’éradication de la pauvreté (Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, 2018). La problématique des « changements climatiques » en tant que telle ne figure pas parmi les « problèmes les plus importants » auxquels les Africains enquêtés par Afrobarometer voudraient que leurs gouvernements s’attaquent (voir Coulibaly, Silwé, & Logan, 2018). Mais les inquiétudes relatives à l’impact des changements climatiques pourraient s’intégrer à certaines des autres priorités identifiées, y compris l’approvisionnement en eau (mentionné par 24% des répondants), les pénuries alimentaires (18%), et l’agriculture (17%). Et un climat changeant pourrait fortement entraver le progrès dans la mise en oeuvre de ces priorités. Les pays africains dominent le bas du classement de la Notre Dame Global Adaptation Initiative (ND-GAIN) (2019), ce qui signifie qu’ils sont les pays les plus vulnérables et les moins bien préparés à affronter les changements climatiques au monde.

En dépit de la contribution infinitésimale du continent aux émissions de gaz à effet de serre qui provoquent les changements climatiques, la plupart des pays africains ont volontiers ratifié les accords internationaux visant à les combattre, y compris la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, le Protocole de Kyoto, et l’Accord de Paris sur les Changements Climatiques de 2016 (Nations Unies, 2019). L’Accord de Paris vise à fédérer les actions partout dans le monde visant à limiter une plus grande augmentation de la température et à renforcer la capacité des pays à contrer l’impact des changements climatiques, y compris un engagement des pays développés à consacrer, d’ici 2020, $100 milliards aux besoins relatifs à l’adaptation aux changements climatiques et à la réduction de leurs effets pervers sur les pays en voie de développement (Munang & Mgendi, 2017; UN Climate Change, 2018).

En mars 2019, les décideurs et acteurs clef de tous les 54 pays d’Afrique se sont réunis à Accra à l’occasion de l’édition 2019 de la Semaine du Climat en Afrique pour élaborer des plans à présenter au Sommet Action Climat des Nations Unies à New York en septembre (UN Climate Change, 2019). L’Organisation des Nations Unies a résumé sa demande d’actions pressantes par rapport au climat en son Objectif de Développement Durable No. 13: « Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions », invitant les pays à intégrer des mesures relatives aux changements climatiques aux politiques et stratégies nationales, renforcer la résilience aux aléas et catastrophes naturelles associées aux changements climatiques, et sensibiliser et renforcer les capacités en vue de mettre en place un système d’alerte rapide et de réduire leur impact (Programme des Nations Unies pour le Développement, 2019).

Plusieurs gouvernements africains ont présenté les vulnérabilités de leurs pays relatives à l’agriculture, aux ressources hydriques, à la sécurité alimentaire, aux moyens de subsistance, et à d’autres secteurs, et ont intégré l’atténuation des effets pervers des changements climatiques aux plans nationaux (voir par exemple Ministère Ougandais des Finances, de la Planification et du Développement Economique, 2018, et Ministère Ougandais de l’Eau et de l’Environnement, 2015).
Mais le renforcement de la résilience face aux changements climatiques nécessitera des actions engagées et coordonnées (Busby, Smith, White, & Strange, 2012), soutenues par d’importantes ressources et une population qui comprend et soutient le besoin de prioriser les changements climatiques. Comment l’Africain lambda perçoit-il les changements climatiques? Les discours portant sur la nécessité d’actions urgentes concordent-ils avec leurs expériences et besoins?

Les résultats du dernier round d’enquêtes d’opinions publiques d’Afrobarometer révèlent une conscience aigüe des changements climatiques dans certains pays – souvent renforcée par l’observation personnelle – mais le contraire dans d’autres. À travers le continent, parmi les personnes qui ont entendu parler des changements climatiques, une grande majorité affirment qu’ils rendent la vie plus difficile et qu’il faut les contrer. Mais quatre Africains sur 10 n’ont pas connaissance du concept de changements climatiques – même s’ils ont, dans certains cas, personnellement observé des changements préjudiciables des régimes climatiques. Et seuls trois sur 10 environ sont véritablement « avertis des changements climatiques », alliant la connaissance du terme avec une connaissance basique des causes et effets pervers du phénomène. Les groupes qui sont peu familiers des changements climatiques – et pourraient constituer une bonne cible pour les campagnes de sensibilisation et de plaidoyer en faveur du renforcement de la base populaire des actions visant la réduction des effets pervers des changements climatiques – incluent les personnes qui travaillent dans l’agriculture, les résidents ruraux, les femmes, les pauvres, et les moins instruits.