- En moyenne, à travers 39 pays, une majorité d'Africains expriment « partiellement » ou « beaucoup » confiance en seulement trois des 11 institutions et types de dirigeants sur lesquels portait l'enquête : les leaders religieux (66%), l'armée (61%), et les chefs traditionnels (56%). o Moins de la moitié des répondants disent faire confiance au président (46%), à la police (46%), aux tribunaux (47%), au Parlement (37%) et à d'autres institutions publiques.
- Depuis 2011, la confiance du public envers les 11 institutions a régressé, avec notamment des chutes à deux chiffres en ce qui concerne le Parlement (-19 points de pourcentage), le parti au pouvoir (-16 points), le président (-12 points), et les cours et tribunaux (-10 points).
- En moyenne, pour les 11 institutions, l'Afrique de l'Est et l'Afrique de l'Ouest enregistrent les scores de confiance les plus élevés, suivies par l'Afrique Australe, l'Afrique du Nord et l'Afrique Centrale.
- La Tanzanie (78%), le Niger (67%) et le Burkina Faso (61%) enregistrent les scores moyens les plus élevés de la confiance vis-à-vis de ces 11 institutions, tandis que le Gabon (26%), l'Eswatini (27%), São Tomé et Príncipe (30%) et le Niger (30%) affichent les scores les plus bas.
- En dépit de la tendance générale à la baisse de la confiance populaire, la Tanzanie, le Togo et le Mali font partie des pays qui affichent une croissance de leur niveau de confiance vis-à-vis de certaines de leurs principales institutions.
La confiance envers les institutions est un élément fondamental du bon fonctionnement de la société, en particulier dans une démocratie. Cette confiance se manifeste lorsque les citoyens estiment que les institutions tiennent leurs promesses, sont responsables, efficaces, compétentes, transparentes et intègres (Kaasa & Andriani, 2021). Quand les individus ont confiance en une institution publique, ils s’attendent à ce que leurs interactions avec les autorités aient des résultats positifs plutôt que préjudiciables pour eux Beesley & Hawkins, 2022).
Les sociétés ne vivent en harmonie que lorsque les institutions publiques jouent leur rôle en générant la confiance nécessaire à la vie collective (Roché, 2016, p.12). Comme l’ont noté Newton et Norris (2000, p. 56), « la confiance institutionnelle agit comme la pierre angulaire de la cohésion sociale, garantissant que les citoyens coopèrent tout en adhérant aux normes sociétales ». La confiance envers les institutions sous-tend la stabilité et la légitimité de la gouvernance démocratique, comme le souligne Easton (1975, p. 439), qui affirme que « sans confiance politique, un système risque la délégitimisation, ce qui pourrait conduire à l’instabilité sociale ».
Quand les citoyens ont confiance vis-à-vis des institutions, ils sont plus susceptibles de faire preuve de solidarité avec les autres membres de la communauté, de respecter les lois et les régulations, de soutenir les politiques et les programmes gouvernementaux et d’être optimistes quant à l’avenir, un facteur déterminant de la croissance économique (Cloutier, Zovighian, & Bove, 2023). En limitant l’incertitude et les coûts de transaction, la confiance envers les institutions encourage également l’investissement et d’autres activités économiques (Putnam, 1993 ; Kaasa & Andriani, 2021).
En revanche, un manque de confiance vis-à-vis des institutions publiques pourrait entraîner toute une panoplie de problèmes sociaux et politiques. Le déclin de la confiance institutionnelle est lié à « une fragmentation accrue de la société, où les citoyens sont plus susceptibles de soutenir les mouvements populistes et anti-establishment » (Hetherington, 2005, p. 101). Dans de nombreux pays, en particulier dans les pays en développement, le manque de confiance du public envers les institutions gouvernementales va de pair avec l’acceptation de comportements délictueux tels que la fraude fiscale, ainsi qu’une polarisation accrue et une baisse du soutien à l’offre de biens publics, autant d’éléments qui pourraient constituer des obstacles au développement (Beesley & Hawkins, 2022). En outre, un manque de confiance limite la capacité de l’Etat à fonctionner efficacement, ce qui entraîne un « cercle vicieux de gouvernance inefficace et de méfiance croissante » (Rothstein & Stolle, 2008, p. 445). Ces cycles sont particulièrement néfastes dans les démocraties fragiles, où la confiance institutionnelle est déjà faible et où la légitimité des institutions publiques est souvent remise en question (Norris, 2011).
Dans ce contexte, à quel point les Africains ont-ils confiance en leurs institutions publiques ?
A en croire les résultats des enquêtes Afrobarometer réalisées dans 39 pays africains entre fin 2021 et mi-2023, les Africains ont moins confiance en leurs principales institutions et en leurs dirigeants qu’il y a une dizaine d’années. Seuls les chefs religieux, l’armée et les chefs traditionnels jouissent encore d’une confiance majoritaire, alors que les institutions politiques suscitent le moins de confiance. Les niveaux de confiance varient considérablement en fonction de la région et du pays, les Africains des régions Est et Ouest affichant des niveaux de confiance plus élevés que leurs congénères d’Afrique Australe, d’Afrique Centrale et d’Afrique Septentrionale.
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