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Key findings
  • Plus de six Gabonais sur 10 (62%) disent être « pas très libres » ou « pas du tout libres » de dire ce qu’ils pensent
  • Près de neuf Gabonais sur 10 (88%) déclarent qu’ils doivent « souvent » ou « toujours » faire attention à ce qu’ils disent sur le plan politique. Le Gabon se classe deuxième sur 18 pays africains par rapport à cette prudence requise
  • Par contre, deux tiers (65%) des Gabonais disent être libres d’adhérer à la formation politique de leur choix. Encore plus (71%) affirment leur liberté de choisir pour qui ils votent
  • La proportion de Gabonais en faveur de la liberté des médias est passé de 61% en 2017 à 81% en 2020.
  • Mais en pratique, plus de trois quarts (78%) des répondants estiment que la presse au Gabon n’est « pas très libre » ou « pas du tout libre » de publier sans censure du gouvernement. Sur 18 pays interrogés, le Gabon se classe deuxième dans la perception d’un manque de liberté des médias.
  • La majorité (58%) des Gabonais s’opposent à l’interdiction des nouvelles, informations, ou opinions que le gouvernement désapprouve. Mais la même proportion (57%) affirment que le gouvernement devrait pouvoir interdire des critiques ou injures à l’encontre du président.

Le Gabon, pays démocratique depuis le début des années 1990, est comme bon nombre de pays africains dont la démocratie ne se limite parfois qu’à la simple tenue d’élections régulières. Pourtant nous savons que la force de la démocratie libérale réside dans le fait qu’elle donne au peuple ce à quoi il aspire le plus: la liberté (Diallo, 2011). Le Gabon, signataire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, a une histoire politique marquée par une longue série de problèmes liés à l’expression des libertés, raison pour laquelle d’aucuns présentent les libertés civiles comme « le maillon faible » de la démocratie gabonaise (Moukala, 2018).

Concernant la liberté de la presse, par exemple, le pays a vu un constant recul dans le classement de Reporters Sans Frontières (2020), passant de la 95e position sur 180 pays en 2013 à la 115e place en 2019. Les inquiétudes sont grandissantes depuis l’entrée en fonction en 2018 de la Haute Autorité de la Communication (HAC), qui suspend des médias et journalistes publiant des articles qui critiquent le président, son entourage, ou des proches du pouvoir (Reporters Sans Frontieres, 2020). C’est d’ailleurs dans cet esprit que l’Organisation Patronale des Médias (OPAM) du Gabon a récemment invité la HAC au « ressaisissement » pour œuvrer à une presse libre et indépendante, plutôt qu’à recourir automatiquement aux sanctions à titre conservatoire qu’elle juge être souvent injustifiées (Kanganga, 2020). Ce fut par exemple le cas de Yves-Laurent Goma, le correspondant de Radio France Internationale (RFI), dont l’accréditation a été suspendue pendant deux mois en août 2019 en raison d’un prétendu « faux reportage » sur l’intégrité physique du chef de l’Etat gabonais (Boko, 2019).

Si l’exercice de la démocratie requiert une certaine liberté d’action de la part des gouvernants vis-à-vis des journalistes, des représentants de la société civile, et des syndicats afin que ces derniers puissent effectivement jouer leur rôle de contrepouvoir et de levier pour une meilleure visibilité dans la gestion de la cité, il semble que le Gabon soit également confronté à certaines difficultés dans ce domaine. En témoigne la vague d’arrestations des leaders de la confédération syndicale Dynamique Unitaire, arrêtés pour avoir déclaré dans un discours en juillet 2019 que selon leur « intime conviction » le Président Ali Bongo Ondimba était soit décédé ou avait perdu ses capacités cognitives pour diriger le pays suite à son accident vasculaire célébrable d’octobre 2018 (Info241, 2019).

Au regard de ce contexte politique, ou le respect des libertés civiles restent un défi pour les autorités gabonaises, il convient de s’interroger sur la question de savoir comment les Gabonais perçoivent leurs libertés aujourd’hui.

Les résultats de la dernière enquête Afrobarometer montrent que les Gabonais estiment ne pas être suffisamment libres de s’exprimer et admettent devoir faire attention à ce qu’’ils disent au sujet de la politique. Ils revendiquent également moins de censure du gouvernement sur les médias. Par contre, ils sont majoritairement pour l’interdiction de toute publication qui injure ou qui critique le chef de l’Etat.

Lionel Osse Essima

Lionel is the assistant project manager for Anglophone West Africa and North Africa.